samedi 28 novembre 2015

Les Neiges de l'éternel de Claire Krust

Année d'édition : 2015
Edition : Actu SF
Nombre de pages : 344
Public visé : Adulte
Quatrième de couverture :
Dans un Japon féodal fantasmé, cinq personnages racontent à leur manière la déchéance d’une famille noble. Cinq récits brutaux qui voient éclore le désespoir d’une jeune fille, la folie d’un fantôme centenaire, les rêves d’une jolie courtisane, l’intrépidité d’un garçon inconscient et le désir de liberté d’un guérisseur.
Le tout sous l’égide de l’hiver qui s’en revient encore.






Un roman magnifique, parfait de bout en bout, une couverture splendide pleine de délicatesse, une histoire empreinte de magie et de personnages forts et touchants, et surtout une écriture majestueuse de l’auteure qui a parfaitement su lier fluidité et langage lyrique. Un vrai trésor !

Dans un Japon d’un autre temps, l’hiver reprend ses droits et impose son atmosphère à la fois rigide et poétique. La pureté de la neige accompagnée du froid glacial viennent entacher des vies tragiques toutes liées à une famille noble habitant une demeure ancienne et puissante. Sur une centaine d’années, on croise cinq destins, celui d’une jeune fille prête à tout pour sauver son frère, d’un enfant malade face à un fantôme, d’une courtisane coincée dans une auberge pouilleuse, d’un fantôme centenaire réveillé par l’intrépidité d’un jeune garçon, et enfin le fils d’un guérisseur lasse de la rancune des villageois et obligé de guérir une mourante.

Claire Krust propose un ouvrage œuvrant dans un empire japonnais médiéval où les destins des personnages s’entrecroisent, tous intimement liés par la famille du Daimyô, noble seigneur qui régit un territoire, dont la famille détruite, semble influencer des vies au travers du temps qui passe. Cinq protagonistes principaux sont les héros de cinq grandes parties du roman, sortes de nouvelles qui racontent la déchéance d’un clan familial sur plusieurs dizaines d’années.

Ce qu’il faut souligner, c’est la qualité d’écrivain de l’auteure, elle écrit merveilleusement bien, le genre d’écriture que l’on prend le temps de lire, c’est tellement fluide et en même temps les mots sont soigneusement choisis, c’est élégant et poétique. La plume de l’auteure est fine et délicate mais aussi incisive, elle crée une atmosphère magique dans un Japon médiéval aux mœurs politiques difficiles mais fortement imprégnés de cette culture pleine de rigidité, de respect et d’une zénitude incroyable. On est apaisé par cette ambiance et les glaces de l’hiver viennent nous figer dans la lecture de ce roman qui conte aussi des destins tragiques, cruels : la maladie, la souffrance, la solitude, les destinées de servitude, la mort sont autant de thèmes forts traités, cependant chaque fois, une étincelle d’espoir vient illuminer le tableau. D’autres influences d’un Japon ancestral sont présentes pour transporter le lecteur dans cet univers imaginé, l’art de la calligraphie où la dextérité de l’artiste traverse tous les âges, l’art du guerrier samouraï respire le respect et la rigueur, les guérisseurs aux dons issus de Dieux et au talent d’herboriste, le charme élégant des courtisanes poudrées et aux coiffures complexes, la quête de l’héritier masculin au destin familial tracé ainsi que les croyances superstitieuses faites de fantômes et d’esprits. Et toujours cet hiver, saison belle et pourtant si funeste, la neige, les montagnes, le froid extrême, les flocons cotonneux, la glace, tout autant de choses qui font de l’hiver une saison majestueuse et attractive et qui transpire une aura de sagesse et de silence mordant. On ressent donc tout l’amour de l’auteure pour cette civilisation et la richesse de ses connaissances dans cette dernière, c’est concis et précis, elle ne se perd jamais dans des fioritures inutiles et usent avec beaucoup d’intelligence de tout ce qui la construit. Certes, le roman n’est pas porté sur l’action mais l’on y est indéniablement immergé et transporté.

C’est donc dans cette ambiance si particulière que le lecteur suit Yuki, une jeune fille noble qui quitte sa famille pour traverser les villages et subir l’hiver en quête d’un guérisseur pour sauver la vie de son frère aîné gravement malade ; Shota, un très jeune garçon malade et condamné qui voit un fantôme et ne comprend pas forcément ce qu’il lui arrive ; Sayuri, une jeune courtisane rêvant d’un avenir meilleur asservie dans une auberge où les clients sont de pauvres villageois à la recherche d’un peu de chaleur humaine pour oublier leur quotidien froid et difficile ; Takeshi, un adolescent qui visite une vieille demeure hantée suite à une promesse faite à un aieul et subit la rancœur et la solitude d’un fantôme ; enfin, Seimei, fils de guérisseur, que la solitude a rendu amer et qui souhaite enfin retrouver une liberté échappée depuis des années. L’auteure surprend à travers ces cinq récits à la fois indépendants et intimement liés, on commence chaque histoire en croyant certaines choses et puis non, les rencontres, les personnages, les fantômes, les âges traversés perdent et baladent le lecteur, et lorsque les liens étroits se dessinent avec ce personnage de départ qu’est Yuki et cette famille du Daimyô dont le destin tragique traverse le temps, on est souvent surpris.

En bref, un premier roman de l’auteure d’une extrême douceur et beauté par toutes les facettes qui le construisent : couverture, écriture et histoire et que l’on savoure en prenant le temps d’apprécier chaque mot ! A lire absolument.

Je remercie Louve du forum Mort Sure pour sa confiance dans ce partenariat et les éditions ActuSF pour avoir intelligemment choisi d’éditer cette pépite !
 
Chronique de Walkyrie

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